La source d’eau chaude du Pérotin
- Par Nature Source Chaude
- Publié le
- Mis à jour le 20 mai 2025
Situé à cheval sur la Meurthe-et-Moselle et la Moselle, à l’ouest d’Avril et à l’est de Moyeuvre-Petite, le site du Pérotin abritait autrefois une source chaude très abondante.
D’après des analyses, cette dernière offrait une grande proportion de matières minérales diverses, et il a été constaté, grâce à des cures, combien ses bienfaits étaient remarquables. Connu de tous les habitants de la région, ce lieu avait la réputation de guérir de nombreux maux.
Mais celle-ci a cessé de couler dans les années 1970. Quelle est donc l’histoire de cette source qui a débuté en 1909 ?
AU SOMMAIRE :
La seule source d'eau chaude du Pays-Haut
En 1909, un sondage foré à proximité de Moyeuvre-Petite dans le but de trouver des couches de houille au-delà des minerais de fer a révélé de manière inattendue un formidable geyser jaillissant du tube de forage. Les travaux ont alors été interrompus.
Captée à une profondeur de 956 mètres, la source se caractérisait par un débit extrêmement fort, de l’ordre de 450 litres par minute.
C’était la seule source chaude découverte dans tout le bassin industriel de Briey et du Pays-Haut. Pourtant, vers 1880, on assiste à une véritable ruée sur les mines de fer en Lorraine.
Depuis cette date, de nombreux sondages et forages ont été réalisés pour l’extraction du minerai de fer. Même si certains ont atteint 900 mètres de profondeur, toutes les eaux rencontrées étaient froides et très ferrugineuses.
La source chaude pendant la période d'occupation allemande
En 1914, la source était située en bordure de l’ancienne frontière franco-allemande, entre Joeuf et Hayange, au lieu-dit « Pérotin », d’où elle tire son nom.
Ainsi, lors de la Première Guerre mondiale, les troupes d’occupation s’en emparèrent et firent construire un bassin pour recueillir l’eau chaude. Étant situé à l’arrière du front, le site thermal servait de camp de repos aux troupes allemandes.
Pas moins de 600 000 soldats et officiers français participèrent à la grande bataille de Lorraine qui se déroula en 1914 et dura près de 45 jours. Les troupes allemandes étaient tout aussi nombreuses.
🏥Le saviez-vous?
Durant la Première Guerre mondiale, de 1914 à 1918, les blessés étaient accueillis par les stations thermales et soignés dans des hôpitaux militaires construits à la hâte.
Ainsi, ceux qui avaient échappé à la mort sur les champs de bataille se rendaient dans les stations thermales pour soigner leurs chairs meurtries.
C’est ainsi que le souvenir de leur rôle joué pendant ce conflit meurtrier a permis l’adoption de la loi du 24 septembre 1919 en France. Celle-ci érige en station hydrominérale toute commune, fraction de commune ou groupe de communes qui possède sur son territoire des sources minérales ou un établissement exploitant une ou plusieurs sources d’eau minérale.
Une taxe spéciale, appelée taxe de séjour, est devenue obligatoire et vient compléter les ressources communales. Ainsi, dans une station hydrominérale, plus le nombre de visiteurs est important et plus le montant de la taxe perçu par la commune augmente.
Un cadre convivial et des eaux bienfaisantes
D’après un feuillet de presse issu de l’Almanach de l’Est Républicain datant de 1948, la source jaillirait sous une sorte de coupole (comme en 1914) ; l’eau s’écoulerait ensuite vers une piscine par une pente naturelle. Elle rejoignait ensuite un gros ruisseau dénommé Le Conroy, distant d’une centaine de mètres.
Ce même journal décrit la piscine d’origine, construite par les troupes d’occupation, comme étant très vétuste en raison d’un manque total d’entretien.
Cette simple piscine profitait toutefois de la température agréable de la source (autour de 49 degrés à l’émergence ♨️) et de ses vertus curatives.
Comme l’eau était naturellement chaude, il était possible de la refroidir directement dans la piscine sans qu’aucune opération de chauffage ou de refroidissement artificiel ne soit nécessaire. De plus, comme le bassin était alimenté en permanence, la qualité de l’eau restait constante. Cela constituait un avantage considérable par rapport à une installation artificielle.
Après 1948, le site a subi quelques travaux d’aménagement qui ont légèrement changé son aspect, au cœur d’un cadre verdoyant. Vers 1950, la source a été mise en valeur par la remise en état de sa margelle de piscine. Un bosquet d’arbres, dont on voit les traces des opérations de débroussaillage, n’offre plus ses ombrages et rend le lieu plus attrayant pour les campeurs.
Tout au long de l’année, la source était un but d’excursion pour les habitants de la région qui venaient y prendre le bon air et s’offrir une escapade dépaysante. Le site, en pleine forêt de hêtres et de chênes, à l’abri des vents dominants d’ouest, rappelle certains coins de la région des Vosges.
Durant la belle saison, cette source suscitait la curiosité et continuera d’attirer des randonneurs, des campeurs et des touristes.
En 1910, la source ne pouvait être atteinte qu’en franchissant le Conroy par une passerelle installée par le Club vosgien.
Dans les années 1950, une route offrait aux automobilistes, même aux plus pressés, l’occasion de faire une halte au bord de la source.
Le tarissement de la source
À partir des années 1950, des perturbations notables apparaissent dans le débit et la température de la source.
Au début des années 1970, la source se bouche (effondrement possible d’un tuyau). Durant ses 20 dernières années, la source a connu ses heures de gloire. Malgré l’intérêt de cette source, le groupement de communes (Avril, Neufchef, Moyeuvre-Petite) qui gère le site peine à s’entendre pour la réalisation d’un nouveau forage. Cela n’échappe pas à Jean Kiffer, maire d’Amnéville, qui prend tout le monde de court en décidant d’effectuer un forage dans sa ville.
Entre février et avril 1979, un forage supervisé par le BRGM (service géologique national) est réalisé par l’entreprise Infralor Cofor dans le bois de Coulanges à Amnéville. Ce bois est situé à environ 10 km du site du Pérotin. D’une profondeur de 900 mètres, il permet d’atteindre un gisement d’eau chaude dont la teneur en fer est élevée et qui est probablement le même que celui de l’ancienne source du Pérotin. Cette source sera nommée source Saint-Éloi, en hommage au saint patron des sidérurgistes.
En février 1980, ces eaux thermales, dont la température atteint 42 °C, prodiguent leurs bienfaits à l’aide de deux grosses buses dans la première piscine thermale de Moselle, qui plus est, gratuite. L’installation est encore rudimentaire : il s’agit d’une piscine hors sol (qui nuit à la qualité de l’eau thermale ; voir notre article) en métal de neuf mètres sur quatre. Un cabanon servant de vestiaire est accolé à la piscine.
🎥 Pour voir à quoi ressemblait la piscine, je vous invite à regarder le mini reportage réalisé par France 3 Lorraine : De la source Saint-Eloi aux thermes d’Amnéville.
En 1981, l’autorisation d’exploitation de la source est accordée à son propriétaire. Un établissement thermal est alors construit dans la foulée à Amnéville, mais le projet prend du retard (voir la carte pour plus d’informations). Il portera alors le nom de centre thermal de Saint-Eloi. Deux autres établissements utilisant la même source verront le jour : Thermapolis (site officiel ici) et la Villa Pompéi.
La fontaine de la source du Pérotin
Une fontaine en forme de totem s’élève pour le plaisir des yeux à près de 4 mètres de hauteur sur le site. Cet édicule était déjà présent dans les années 1950, comme en témoigne cette photo de famille prise le même jour près de la piscine (voir la photo ci-dessus).
Sur la plaque commémorative apposée sur la fontaine, on peut lire : « Source thermale de Pérotin – Sondage exécuté sous l’autorité de M. Vaudeville, ingénieur en chef des mines de Nancy… ». Aujourd’hui, cet édicule, dans un état pitoyable, est le seul vestige visible du site.
Nature de l'eau et vertus thérapeutiques
On prêtait à cette source chaude des vertus curatives, notamment pour les affections des voies digestives, de l’estomac et des intestins, l’arthrite, les rhumatismes, l’obésité, etc. Certains s’y baignaient périodiquement. D’autres encore venaient y consommer l’eau sur place ou y remplir des bouteilles.
Néanmoins, c’est uniquement lorsqu’elle est bue sur place que l’eau manifeste pleinement ses propriétés thérapeutiques (à condition qu’elle n’ait pas été altérée).
Il s’agissait d’eaux chlorurées, sodiques, lithinées, ferrugineuses et sulfureuses. D’ailleurs, elles répandaient une forte odeur d’œuf pourri due à la présence d’hydrogène sulfuré. Pour en savoir plus sur les propriétés de ce gaz, je vous invite à lire notre article « Nettoyer ses poumons avec des méthodes simples et naturelles ».
Enfin, il faut distinguer la source chaude du Pérotin (issue d’un forage de 950 mètres) d’une source chaude naturelle dont les eaux parviennent jusqu’à la surface du sol en emportant le souvenir de toutes les couches géologiques qu’elles traversent (et des micro-organismes qu’elles rencontrent).
Malgré ses propriétés thérapeutiques remarquables, la source du Pérotin avait une puissance moindre par rapport à une source naturelle.